Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/355

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

J’ai quarante ans ; je suis né d’une famille très saine[1], j’ai toujours été bien portant ; je passais pour un modèle de fraîcheur physique et intellectuelle, d’énergie ; je suis d’une constitution robuste, mais je n’ai que peu de barbe ; sauf aux aisselles et au mons Veneris[ws 1], je n’ai pas de poils sur le corps.

Peu après ma naissance, mon pénis était déjà extraordinairement grand ; à l’heure qu’il est, il a en statu erectionis[ws 2] 21 centimètres de longueur et une circonférence de 14 centimètres. Je suis excellent cavalier, gymnaste, nageur ; j’ai pris part à deux campagnes comme médecin militaire. Je n’ai jamais eu de goût pour les vêtements de femme ni pour les occupations féminines. Jusqu’à l’âge de puberté, j’étais timide en face du sexe féminin, et je le suis encore quand je me trouve en présence de femmes que je ne connais que depuis peu de temps.

De tout temps la danse me fut antipathique. À l’âge de huit ans s’éveilla en moi l’affection pour mon propre sexe. Tout d’abord j’éprouvais du plaisir en regardant les parties génitales de mes frères. Fratrem meum juniorem impuli ut alter alterius genitalibus luderet, quibus factis penis meus se erexit[ws 3]. Plus tard, en prenant un bain avec les enfants de l’école, les garçons m’intéressaient beaucoup, les filles pas du tout. J’avais si peu de goût pour elles qu’à l’âge de quinze ans encore je croyais qu’elles étaient munies d’un pénis comme nous autres. En compagnie de garçons ayant les mêmes sentiments, nous nous amusions vicissim genitalibus nostris ludere[ws 4]. À l’âge de onze ans et demi, on me donna un précepteur très sévère ; je ne pouvais que rarement aller en cachette trouver mes camarades. J’apprenais très facilement, mais je ne m’accordais pas bien avec mon précepteur ; un jour qu’il m’ennuyait trop, je me mis en rage et je courus sur lui avec un couteau ; je l’aurais tué avec plaisir, s’il ne m’avait pas saisi le bras. À l’âge de douze ans et demi, j’ai déserté la maison paternelle pour une raison analogue, et pendant six semaines je rôdai dans le pays voisin.

On me mit ensuite au lycée ; j’étais déjà développé sexuellement, et, en nous baignant, je m’amusais avec les garçons de la manière que j’ai indiquée, plus tard aussi par l’imitatio coïtus inter femora[ws 5]. J’avais alors treize ans. Les filles ne me plaisaient pas du tout. Des érections violentes m’amenèrent à jouer avec

  1. pubis
  2. état d’érection
  3. mon plus jeune frère poussait à ce que nous jouions l’un l’autre de nos sexes, ce qui me provoquait une érection
  4. à jouer ensemble de nos sexes
  5. simulation du coït entre les cuisse
  1. Plus tard, on a appris qu’un proche parent était mort fou, et que huit sœurs et frères du malade avaient péri entre l’âge de un à huit ans d’hydrocephalus acutus ou chronicus.