Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/26

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porter au milieu des passions viles et mesquines du moment le souffle vivifiant des passions nobles, des grands élans, des généreux dévouements.

À ces époques, où la médiocrité orgueilleuse étouffe toute intelligence qui ne se prosterne pas devant les pontifes, où la moralité mesquine du juste-milieu fait la loi, et la bassesse règne victorieuse, — à ces époques la révolution devient un besoin ; les hommes honnêtes de toutes les classes de la société appellent la tempête, pour qu’elle vienne brûler de son souffle enflammé la peste qui nous envahit, emporter la moisissure qui nous ronge, enlever dans sa marche furieuse tous ces décombres du passé qui nous surplombent, nous étouffent, nous privent d’air et de lumière, pour qu’elle donne enfin au monde entier un nouveau souffle de vie, de jeunesse, d’honnêteté.

Ce n’est plus seulement la question du pain qui se pose à ces époques ; c’est une question de progrès contre l’immobilité, de développement humain contre l’abrutissement, de vie contre la stagnation fétide du marais.

L’histoire nous a conservé le souvenir d’une pareille époque, celle de la décadence de l’empire romain ; l’humanité en traverse aujourd’hui une seconde.




Comme les Romains de la décadence, nous nous trouvons en face d’une transformation profonde qui s’opère dans les esprits et ne demande plus que des circonstances favorables pour se traduire dans les faits. Si la révolution s’impose dans le domaine écono-