Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/339

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démolir jardins et vergers et faire passer dessus la laboureuse à vapeur, afin d’introduire les bienfaits problématiques de la grande culture, ainsi que le rêvent certains réformateurs autoritaires ?

Certes, pour notre part, nous nous garderons bien de le faire. Nous prendrons garde de toucher au lopin du paysan tant qu’il cultive lui-même avec ses enfants, sans recourir au travail salarié. Mais nous exproprierons tout ce qui n’est pas cultivé par les bras de ceux qui détiennent la terre en ce moment. Et lorsque la Révolution Sociale sera un fait accompli, lorsque l’ouvrier des villes ne travaillera plus pour un patron, mais pour les besoins de tous, — les bandes ouvrières, gaies et joyeuses, se rendront à la campagne donner aux champs expropriés la culture qui leur manque et transformer en quelques jours les bruyères incultes en plaines fertiles, apportant la richesse dans le pays, fournissant à tous — « prends-en, il en reste. » — les produits riches et variés que la terre, la lumière, la chaleur, ne demandent qu’à leur donner. Quant au petit propriétaire, croyez-vous qu’il ne comprendra pas les avantages de la culture commune s’il les voit sous ses yeux ? qu’il ne demandera pas lui-même à faire partie de la grande famille ?

Le coup de main que les bataillons des désœuvrés en guenilles de Londres, les hop-pickers, donnent aujourd’hui au cultivateur du Kent, que la ville donne quelquefois au village à l’époque des vendanges, sera donné pour la culture, comme il est donné aujourd’hui pour la récolte. Industrie éminemment périodique, (les spéculateurs du Far West l’ont admirablement compris) qui demande à certaines époques un surcroît de bras, pour l’amélioration du sol, bien plus