Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/342

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

et c’est pour cela même — notons-le en passant — qu’une transformation correspondante dans la répartition des produits s’impose aujourd’hui. Mais, est-ce bien à l’intérêt personnel, à l’avidité intelligente des patrons que nous devons ces progrès ? N’y a-t-il pas eu quelques autres facteurs beaucoup plus importants qui ont pu produire les mêmes résultats et qui ont pu même contrebalancer jusqu’aux effets nuisibles de la rapacité des industriels ?

Ces facteurs, nous les connaissons tous. Il suffit de les nommer pour faire ressortir leur importance. C’est d’abord le moteur à vapeur, — commode, maniable, toujours prêt à travailler, qui a révolutionné l’industrie. C’est la création des industries chimiques devenues si importantes que leur développement, au dire des technologistes, donne la vraie mesure du développement industriel de chaque nation. Elles sont entièrement un produit de notre siècle : souvenez-vous de ce qu’était la chimie au siècle passé ! C’est enfin tout ce mouvement d’idées qui s’est produit depuis la fin du dix-huitième siècle et qui, dégageant l’homme des étreintes métaphysiques, lui a permis de faire ces découvertes physiques et mécaniques qui ont bouleversé l’industrie. Qui oserait dire, en présence de ces facteurs puissants, que l’abolition des maîtrises et jurandes fût plus importante pour l’industrie que les grandes découvertes de notre siècle ? Et ces découvertes étant données, qui oserait affirmer d’autre part, qu’un mode quelconque de production collective, quel qu’il soit, n’aurait pas su en bénéficier au même titre, ou plus encore, que l’industrie privée ?

Quant aux découvertes elles-mêmes, il faudrait n’avoir jamais lu les biographies des inventeurs, ni