délimiter le pouvoir, d’abolir la domination. Excellent instrument pour résoudre d’une manière pacifique les querelles entre gouvernants, — de quelle utilité peut-il être pour les gouvernés ?
L’histoire du suffrage universel n’est-elle pas là pour le dire ? — Tant que la bourgeoisie a craint que le suffrage universel ne devînt entre les mains du peuple une arme qui pût être tournée contre les privilégiés, elle l’a combattu avec acharnement. Mais le jour où il lui a été prouvé, en 1848, que le suffrage universel n’est pas à craindre, et qu’au contraire on mène très bien un peuple à la baguette avec le suffrage universel, elle l’a accepté d’emblée. Maintenant, c’est la bourgeoisie elle-même qui s’en fait le défenseur, parce qu’elle comprend que c’est une arme, excellente pour maintenir sa domination, mais absolument impuissante contre les privilèges de la bourgeoisie.
De même pour la liberté de la presse. — Quel a été l’argument le plus concluant, aux yeux de la bourgeoisie en faveur de la liberté de la presse ? — Son impuissance ! Oui, son impuissance : M. de Girardin a fait tout un livre sur ce thème : l’impuissance de la presse. « Jadis, — dit-il, — on brûlait les sorciers, parce qu’on avait la bêtise de les croire tout-puissants ; maintenant, on fait la même bêtise par rapport à la presse, parce qu’on la croit, elle aussi, toute-puissante. Mais il n’en est rien : elle est tout aussi impuissante que les sorciers du moyen âge. Donc plus de persécutions de la presse ! » Voilà le raison-