Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/153

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nisation future, et dans beaucoup de nations elle a gardé ce même caractère jusqu’à aujourd’hui.


On sait maintenant, et on ne le conteste presque plus, que la commune du village n’était pas un trait spécifique des Slaves ni même des anciens Teutons. Elle existait en Angleterre pendant la période saxonne aussi bien que sous la domination normande, et elle a survécu en partie jusqu’au dix-neuvième siècle[1] ; elle était à la base de l’organisation sociale de l’ancienne Écosse, de l’ancienne Irlande et de l’ancien Pays de Galles. En France, les possessions communales et les distributions de terres arables par l’assemblée du village persistèrent depuis les premiers siècles de notre ère jusqu’à Turgot, qui trouva les assemblées villageoises « trop bruyantes » et en commença l’abolition. La commune villageoise survécut à la domination romaine en Italie et reparut après la chute de l’Empire romain. Elle était la règle chez les Scandinaves, les Slaves, les Finnois (dans la pittäyä, comme aussi, probablement, dans la kihlakunta), chez les Coures et les Lives. La commune villageoise dans l’Inde — ancienne et moderne, aryenne et non-aryenne — est bien connue par les œuvres de sir Henry Maine qui ont fait époque ; Elphinstone l’a décrite parmi les Afghans.

  1. Si je me conforme en cela aux opinions de Nassé, Kovalevsky et Vinogradov (pour ne nommer que les spécialistes modernes) et non à celles de M. Seebohm (M. Denman Ross ne peut être cité que pour mémoire) ce n’est pas seulement à cause de la science profonde et la concordance de vues de ces trois écrivains, mais aussi à cause de leur parfaite connaissance de la commune villageoise sous toutes ses formes, en Angleterre comme ailleurs, — connaissance dont le défaut se fait beaucoup sentir dans l’ouvrage, remarquable d’ailleurs, de M. Seebohm. La même observation s’applique encore davantage aux si élégants écrits de Fustel de Coulanges, dont les opinions et les interprétations passionnées des anciens textes lui sont particulières.