Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/59

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presque toutes ces associations, Quant à la protection que les oiseaux les plus faibles trouvent dans cette union, elle est évidente. Le Dr Coués, cet excellent observateur, vit, par exemple, de petites hirondelles des falaises, nichant dans le voisinage immédiat du faucon des prairies (Falco polyargus). Le faucon avait son nid sur le haut d’un de ces minarets d’argile qui sont si communs dans les cañons du Colorado, tandis qu’une colonie d’hirondelles nichait juste au-dessous. Les petits oiseaux pacifiques ne craignaient point leur rapace voisin ; ils ne le laissaient jamais approcher de leur colonie. Ils l’entouraient immédiatement et le chassaient, de sorte qu’il était obligé de déguerpir au plus vite[1].

La vie en société ne cesse pas lorsque la période des nids est finie ; elle commence alors sous une autre forme. Les jeunes couvées se réunissent en sociétés de jeunes, comprenant généralement plusieurs espèces. À cette époque, la vie sociale est pratiquée surtout pour elle-même, — en partie pour la sécurité, mais principalement pour les plaisirs qu’elle procure. C’est ainsi que nous voyons dans nos forêts les sociétés formées par les jeunes torchepots bleus (Sitia cœsia)

  1. Elliot Couës, dans Bulletin U. S. Geol. Survey of Territories, IV, n° 7, pp. 556, 579, etc. Parmi les goélands (Larus argentatus), Poliakoff vit, dans un marais de la Russie du Nord, que la région des nids d’un très grand nombre de ces oiseaux était toujours gardée par un mâle qui avertissait la colonie à l’approche d’un danger. En ce cas tous les oiseaux accouraient et attaquaient l’ennemi avec une grande vigueur. Les femelles, qui avaient cinq ou six nids réunis sur chaque tertre du marais, observaient un certain ordre pour quitter leurs nids et aller chercher leur nourriture. Les jeunes oiseaux, qui par eux-mêmes sont absolument sans protection et deviennent facilement la proie des rapaces, n’étaient jamais laissés seuls. (« Habitudes de famille parmi les oiseaux aquatiques », dans les Procès-verbaux de la Section de zoologie de la Société des naturalistes de Saint-Pétersbourg, 17 décembre 1874.)