Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/63

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l’Afrique orientale sont encore couvertes de troupeaux de zèbres, de bubales et autres antilopes.

Il n’y a pas très longtemps les petits cours d’eau du Nord de l’Amérique et du Nord de la Sibérie étaient peuplés de colonies de castors, et jusqu’au xviie siècle de semblables colonies abondaient dans le Nord de la Russie. Les contrées plates des quatre grands continents sont encore couvertes d’innombrables colonies de souris, d’écureuils, de marmottes et autres rongeurs. Dans les basses latitudes de l’Asie et de l’Afrique, les forêts sont encore les demeures de nombreuses familles d’éléphants, de rhinocéros et d’une profusion de sociétés de singes. Dans le Nord, les rennes se rassemblent en innombrables troupeaux ; et vers l’extrême Nord nous trouvons des troupeaux de bœufs musqués et d’innombrables bandes de renards polaires. Les côtes de l’Océan sont animées par les bandes de phoques et de morses, l’Océan lui-même par des multitudes de cétacés sociables ; et jusqu’au cœur du grand plateau de l’Asie centrale nous trouvons des troupeaux de chevaux sauvages, d’ânes sauvages, de chameaux sauvages et de moutons sauvages. Tous ces mammifères vivent en sociétés et en nations comptant quelquefois des centaines de milliers d’individus, quoiqu’aujourd’hui, trois siècles après l’introduction du fusil, nous ne trouvions plus que les débris des immenses agrégations d’autrefois. Combien insignifiant en comparaison est le nombre des carnivores ! Et par conséquent, combien fausse est l’opinion de ceux qui parlent du monde animal comme si l’on ne devait y voir que des lions et des hyènes plongeant leurs dents sanglantes dans la chair de leurs victimes ! On pourrait aussi bien prétendre que toute la vie humaine n’est qu’une succession de guerres et de massacres. L’association et l’entr’aide sont la règle chez les mammi-