Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

économistes qui éternisent les prétendues lois de la production et, faisant le compte des maisons que l’on bâtit chaque année, démontrent par la statistique que les maisons nouvellement bâties ne suffisant pas pour satisfaire toutes les demandes, les neuf dixièmes des Européens doivent habiter des taudis.


Passons à la nourriture. Après avoir énuméré les bienfaits de la division du travail, les économistes prétendent que cette division exige que les uns s’appliquent à l’agriculture et les autres à l’industrie manufacturière. Les agriculteurs produisant tant, les manufactures tant, l’échange se faisant de telle façon, ils analysent la vente, le bénéfice, le produit net ou la plus-value, le salaire, l’impôt, la banque et ainsi de suite.

Mais, après les avoir suivis jusque-là, nous ne sommes pas plus avancés, et si nous leur demandons : « Comment se fait-il que tant de millions d’êtres humains manquent de pain, tandis que chaque famille pourrait cependant produire du blé pour nourrir dix, vingt, et même cent personnes par an ? » ils nous répondent en recommençant la même antienne : division du travail, salaire, plus-value, capital, etc., aboutissant à cette conclusion que la production est insuffisante pour satisfaire à tous les besoins : conclusion qui, alors même qu’elle serait vraie, ne répond nullement à la question : « L’homme peut-il, ou ne peut-il pas, en travaillant, produire le pain qu’il lui faut ? Et s’il ne le peut pas — qu’est-ce qui l’en empêche ? »

Voici 350 millions d’Européens. Il leur faut chaque année tant de pain, tant de viande, de vin, de lait, œufs et beurre. Il leur faut tant de maisons,