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Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/288

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Voilà pourquoi, durant tout ce siècle d’inventions et de progrès, l’agriculture ne s’est perfectionnée que sur des espaces très restreints, occasionnellement et par soubresauts.


Heureusement, il y a toujours eu de petites enclaves, négligées pendant quelque temps par les vautours ; et là nous apprenons ce que l’agriculture intensive peut donner à l’humanité. Citons-en quelques exemples.

Dans les prairies de l’Amérique (qui d’ailleurs ne donnent que de maigres récoltes de 7 à 12 hectolitres à l’hectare, et encore des sécheresses périodiques nuisent-elles souvent aux récoltes) cinq cents hommes, travaillant seulement pendant huit mois de l’année, produisent la nourriture annuelle de 50,000 personnes. Le résultat s’obtient ici par une forte économie de travail. Sur ces vastes plaines que l’œil ne peut embrasser, le labour, la récolte, le battage, sont organisés presque militairement, point de va-et-vient inutiles, point de pertes de temps. Tout se fait avec l’exactitude d’une parade.

C’est la grande culture, la culture extensive, celle qui prend le sol tel qu’il sort des mains de la nature sans chercher à l’améliorer. Quand il aura donné tout ce qu’il peut, on l’abandonnera ; on ira chercher ailleurs un sol vierge pour l’épuiser à son tour.


Mais il y a aussi la culture intensive, à laquelle les machines viennent et viendront toujours plus en aide : elle vise surtout à bien cultiver un espace limité, à le fumer et l’amender, à concentrer le travail et obtenir le plus grand rendement possible. Ce genre de culture s’étend chaque année, et, tandis