Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/295

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Et cependant, — ne nous lassons pas de le répéter, — nous n’avons pas fait du roman. Nous avons raconté ce qui est ; ce qui se fait déjà sur de vastes proportions, ce qui a obtenu la sanction de l’expérience en grand, l’agriculture pourrait dès demain être réorganisée, si les lois de la propriété et l’ignorance générale ne s’y opposaient.

Le jour où Paris aura compris que savoir ce qu’on mange et comment on le produit est une question d’intérêt public ; le jour où tout le monde aura compris que cette question est infiniment plus importante que les débats du parlement ou du conseil municipal, — ce jour-là la Révolution sera faite. Paris saisira les terres des deux départements, et les cultivera. Et alors, après avoir donné pendant toute sa vie un tiers de son existence pour acheter une nourriture insuffisante et mauvaise, le Parisien la produira lui-même, sous ses murs, dans l’enclos des forts, (s’ils existent encore), en quelques heures d’un travail sain et attrayant.


Et maintenant, passons aux fruits et aux légumes. Sortons de Paris et allons visiter un de ces établissements de la culture maraîchère qui font, à quelques kilomètres des académies, des prodiges ignorés par les savants économistes. Arrêtons-nous, par exemple, chez M. Ponce, l’auteur d’un ouvrage sur la culture maraîchère, qui ne fait pas secret de ce que la terre lui rapporte et qui l’a raconté tout au long.

M. Ponce, et surtout ses ouvriers, travaillent comme des nègres. Ils sont huit à cultiver un peu plus d’un hectare (onze dixièmes). Ils travaillent certainement douze et quinze heures par jour, c’est-à-dire trois fois plus