Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/63

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C’est à peu près de la même façon que raisonnent les fortes têtes de la bourgeoisie, lorsqu’elles nous disent : — « Ah, l’expropriation ? J’y suis ; vous prenez à tous leurs paletots, vous les mettez dans le tas, et chacun va en prendre un, quitte à se battre pour le meilleur ! »

C’est une plaisanterie de mauvais goût. Ce qu’il nous faut, ce n’est pas de mettre les paletots dans le tas pour les distribuer ensuite, et encore ceux qui grelottent y trouveraient-ils quelque avantage. Ce n’est pas non plus de partager les écus de Rothschild. C’est de nous organiser en sorte que chaque être humain venant au monde soit assuré, d’abord, d’apprendre un travail productif et d’en acquérir l’habitude ; et ensuite de pouvoir faire ce travail sans en demander la permission au propriétaire et au patron et sans payer aux accapareurs de la terre et des machines la part du lion sur tout ce qu’il produira.

Quant aux richesses de toute nature détenues par les Rothschilds ou les Vanderbilts, elles nous serviront à mieux organiser notre production en commun.

Le jour où le travailleur des champs pourra labourer la terre sans payer la moitié de ce qu’il produit ; le jour où les machines nécessaires pour préparer le sol aux grandes récoltes seront, en profusion, à la libre disposition des cultivateurs ; le jour où l’ouvrier de l’usine produira pour la communauté et non pour le monopole, les travailleurs n’iront plus en guenilles ; et il n’y aura plus de Rothschilds ni d’autres exploiteurs.

Personne n’aura plus besoin de vendre sa force de travail pour un salaire ne représentant qu’une partie de ce qu’il a produit.