Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/114

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val, commandant des troupes royales à Paris, qui se trouvait aux Invalides, promit d’en demander l’autorisation au maréchal de Broglie. L’autorisation n’était pas encore arrivée, lorsque, le 14, vers sept heures du matin, — alors que les invalides, commandées par Sombreuil, étaient à leurs pièces de canon, la mèche à la main, prêts à faire feu, — une foule de sept à huit mille hommes déboucha soudain, au pas de course, des trois rues voisines. Elle traversa « en moins de rien », en s’aidant les uns les autres, le fossé de huit pieds de profondeur et de douze pieds de large qui entourait l’esplanade de l’Hôtel des Invalides, envahit l’esplanade et s’y empara de douze pièces de canon (de 24, de 18 et de 10) et d’un mortier. Les invalides, déjà pénétrés d’un « esprit séditieux », ne se défendirent pas, et la foule, se répandant partout, eut bientôt pénétré dans les souterrains et dans l’église, où se trouvaient cachés les 32.000 fusils, ainsi qu’une certaine quantité de poudre[1]. Ces fusils et ces canons servirent le même jour à la prise de la Bastille. Quant à la poudre, le peuple, dès la veille, en avait déjà arrêté trente-six barils qui allaient être expédiés à Rouen ; ils furent transportés à l’Hôtel de Ville, et toute la nuit on distribua la poudre au peuple qui s’armait.

L’enlèvement des fusils aux Invalides par la foule se faisait très lentement : on sait qu’il n’était pas encore terminé à deux heures. On aurait eu donc tout le temps voulu pour amener la troupe et disperser le peuple, d’autant plus que de l’infanterie, de la cavalerie et même de l’artillerie étaient stationnées tout près, à

  1. Je suis ici la lettre du comte de Salmour, ainsi que Mathieu Dumas, cités par M. Flammermont.