Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/386

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pas admettre. Après que le tribunal criminel, chargé de juger les fauteurs des massacres du 10 août, eut été installé avec beaucoup de solennité, on s’aperçut que ce tribunal ne se souciait pas plus de frapper les coupables que la Haute Cour d’Orléans, qui était devenue, selon l’expression de Brissot, « la sauvegarde des conspirateurs ». Il sacrifia d’abord trois ou quatre comparses de Louis XVI, mais bientôt il acquittait un des plus sérieux conspirateurs, l’ex-ministre Montmorin, ainsi que Dossonville, impliqué dans la conspiration de d’Angremont, et il hésitait à juger Bachmann, le général des Suisses. Après cela, il n’y avait plus rien à attendre de ce côté.

On a cherché à représenter la population de Paris comme composée de cannibales avides de sang qui devenaient furieux dès qu’ils voyaient échapper une victime. C’est absolument faux. Ce que le peuple de Paris comprit, par ces acquittements, c’est que les gouvernants ne voulaient pas faire le jour sur les conspirations qui s’étaient ourdies aux Tuileries parce qu’ils savaient combien d’entre eux seraient compromis, et parce que ces conspirations continuaient encore. Marat, qui était bien renseigné, avait raison de dire que l’Assemblée avait peur du peuple, et qu’elle n’eût pas été mécontente si Lafayette était venu, avec son armée, rétablir la royauté.

Les découvertes faites trois mois plus tard, lorsque le serrurier Gamain dénonça l’existence de l’armoire de fer qui contenait les papiers secrets de Louis XVI, l’ont démontré, en effet. La force de la royauté était dans l’Assemblée.

Alors le peuple, voyant qu’il lui était absolument im-