Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/450

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Repousser la loi agraire, signifiait alors repousser les tentatives de remettre le sol aux mains de ceux qui le cultivaient. C’était repousser l’idée, très populaire parmi les révolutionnaires sortis du peuple, qu’aucune propriété, qu’aucune ferme ne devait avoir plus de 120 arpents (environ 40 hectares) ; que chaque citoyen avait droit à la terre ; et qu’il fallait pour cela saisir les propriétés des émigrés et du clergé, ainsi que les grandes propriétés des riches, et les partager entre les cultivateurs pauvres qui ne possédaient rien.

« Jurer le respect des propriétés », c’était repousser la reprise par les communes rurales des terres qui leur avaient été enlevées pendant deux siècles, en vertu de l’ordonnance royale de 1669 ; c’était s’opposer, en faveur des seigneurs et des récents acquéreurs bourgeois, à l’abolition des droits féodaux sans rachat.

Enfin, c’était combattre toute tentative de prélever sur les riches commerçants un impôt progressif ; c’était faire tomber les lourdes charges de la guerre et de la révolution sur les pauvres.

La formule abstraite avait, on le voit, un sens très tangible.

Eh bien, sur toutes ces questions la Montagne eut à soutenir une lutte acharnée contre les Girondins, si bien qu’elle fut bientôt amenée à en appeler au peuple, à l’insurrection, forcée d’expulser les Girondins de la Convention, afin de pouvoir faire les premiers pas dans la voie indiquée.

Pour le moment, ce « respect des propriétés » s’affirmait chez les Girondins jusque dans les plus petites choses, jusqu’à faire faire inscrire Liberté, Égalité, Pro-