Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/492

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reux de trouver dans l’article de Marat la phrase sur le pillage que nous venons de citer, ils en battirent monnaie pour accuser la Montagne et les Parisiens en bloc de vouloir égorger tous les riches. La Commune n’osa pas approuver l’émeute et Marat même dut se dédire, en la représentant comme fomentée par les royalistes. Quant à Robespierre, il ne manqua pas d’en rejeter la responsabilité sur l’or étranger.

Cependant, l’émeute produisait son effet. La Convention porta de quatre millions à sept millions l’avance qu’elle faisait à la Commune pour maintenir le pain à trois sous la livre, et le procureur de la Commune, Chaumette, vint à la Convention développer cette idée qui, plus tard, fut introduite dans la loi du maximum ; qu’il ne s’agissait pas uniquement d’avoir le pain à un prix raisonnable. Il fallait aussi, disait-il, « que les denrées de seconde nécessité » fussent à la portée du peuple. Il n’existe plus « de juste proportion entre le prix des journées de la main-d’œuvre et de ces denrées de seconde nécessité ». « Le pauvre a fait comme le riche, et plus que le riche, pour la Révolution. Tout est changé autour du riche, lui seul [le pauvre] est resté dans la même situation, et il n’a gagné à la Révolution que le droit de se plaindre de sa misère[1] ».

  1. Économiste plus perspicace que tant d’économistes de profession, cet homme si sympathique mettait le doigt sur le vif de la question. Il montrait comment l’agioteur exagérait les effets des conditions créées par la guerre et les assignats. « La guerre avec la puissance maritime, » disait-il, « les désastres arrivées dans nos colonies, la perte du change, et surtout une émission d’assignats qui n’est plus en équilibre avec le besoin des transactions commerciales, voilà quelques-unes des causes de cette hausse considérable dont nous gémissions ; mais combien est grande leur action, combien est terrible et désastreux leur résultat, quand, à côté, il existe des malveillants, des accapareurs, quand la misère publique est la base des spéculations intéressées d’une infinité de capitalistes qui ne savent que faire des fonds immenses produits par les liquidations. »