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de volontaires[1]. Dans toute la Normandie et la Bretagne il ne se réunit que cinq à six cents hommes, qui ne se battirent même pas, lorsqu’ils se trouvèrent en présence d’une petite armée venue de Paris.

Cependant, dans certaines villes, et notamment dans les ports de Saint-Malo et de Brest, les royalistes trouvaient un fort appui parmi les négociants, et il fallut un puissant effort de la part des patriotes pour empêcher que Saint-Malo ne fût livré, comme le fut Toulon, aux Anglais. Il faut lire, en effet, les lettres du jeune Jullien, commissaire du Comité de salut public, ou de Jean Bon Saint-André, conventionnel en mission, pour comprendre combien faibles étaient les forces matérielles de la République, et jusqu’à quel point les classes opulentes étaient prêtes à soutenir les envahisseurs étrangers. Tout avait été préparé pour livrer à la flotte anglaise la forteresse de Saint-Malo, — qui était armée de 123 canons et de 25 mortiers et très bien approvisionnée de boulets, de bombes et de poudres. Ce fut seulement l’arrivée des commissaires de la Convention qui releva le zèle des patriotes et empêcha cette trahison.

Les représentants en mission ne s’adressèrent pas aux administrations : ils savaient qu’elles étaient gangrenées de royalisme et de « négociantisme ». Ils allèrent à la Société patriotique de chaque ville, grande ou petite. Ils lui proposèrent, d’abord, de « s’épurer ». Chaque membre devait dire à haute voix, devant la Société, ce

  1. La revue dont parla Charlotte Corday devant les juges, et qui aurait réuni des milliers d’hommes, était un mensonge, probablement pour faire peur aux sans-culottes parisiens.