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(10 novembre), à Notre-Dame même, et d’y organiser une Fête de la Liberté et de la Raison, pendant laquelle on chanterait des hymnes patriotiques devant la statue de la Liberté. Cloots, Momoro, Hébert, Chaumette firent une propagande active dans les sociétés populaires, et la fête réussit parfaitement. Cette fête fut si souvent décrite que nous ne nous arrêterons pas à ses détails. Il faut remarquer cependant qu’on préféra un être vivant à une statue pour figurer la Liberté, parce que « une statue, disait Chaumette, eût été encore un pas vers l’idolâtrie ». Comme l’avait déjà fait remarquer Michelet (liv. XIV, ch. III), les fondateurs du nouveau culte recommandaient « de choisir, pour remplir un rôle si auguste, des personnes dont le caractère rende la beauté respectable, dont la sévérité de mœurs et de regards repousse la licence ». Loin d’être une cérémonie gouailleuse, la fête fut plutôt une « chaste cérémonie, triste, sèche, ennuyeuse », dit Michelet, qui était, on le sait, très sympathique à la déchristianisation de 1793. Mais la Révolution, dit-il, était déjà « vieille et lasse, trop vieille pour enfanter ». L’essai de 1793 ne sortait pas du sein brûlant de la Révolution, « mais des écoles raisonneuses des temps de l’Encyclopédie ». En effet, il ressemblait à s’y méprendre au mouvement moderne des Sociétés éthiques (Ethical societies), qui restent aussi en dehors des masses du peuple.

Ce qui nous frappe surtout aujourd’hui, c’est que la Convention, malgré les demandes qui lui venaient de divers côtés, refusait d’aborder la grande question : l’abolition du traitement des prêtres. Par contre, la Commune de Paris et les sections pratiquèrent ouvertement la