Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/146

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en conséquence soutenir qu’il n’est point encore démontré qu’il soit plus économique de vivre de denrées alimentaires importées que de les produire soi-même.

Maintenant si nous analysons la notion de prix, et si nous en distinguons les différents éléments, le désavantage des pays importateurs apparaît, encore plus nettement. Si nous comparons, par exemple, le coût de la culture du blé en Angleterre et en Russie, on nous dit que dans le Royaume-Uni on ne peut produire un quintal de blé à moins de 21 fr. 50, tandis qu’en Russie le prix de revient de ce même quintal est estimé entre 8 fr. 70 et 11 fr. 80[1].

La différence est énorme et elle resterait encore très grande, même si nous admettions qu’il y eût quelque exagération dans le premier chiffre. Mais pourquoi cette différence ? Les cultivateurs russes sont-ils donc beaucoup moins payés pour leur

  1. Les données qui m’ont servi à calculer le prix de revient du blé en Angleterre sont empruntées au Mark Lane Express ; on les trouvera sous une forme très assimilable dans un article sur la culture du froment dans la Quarterly Review d’avril 1887, et dans le livre de W. E. Bear, The British Farmer and his Competitors (Le fermier anglais et ses concurrents), Londres. (Cassel, édit.), 1888. Ces chiffres dépassent un peu la moyenne, ainsi que la récolte qui sert de base aux calculs. Une enquête analogue a été faite sur une grande échelle par les Assemblées provinciales russes et le tout est résumé dans un bon article du Vyestnik Promychlennosti (Messager de l’Industrie), no 49, 1887. Pour comparer le kopeck papier avec le sou j’ai compté le rouble à 63/100 de sa valeur nominale, ce qui fut son cours moyen pendant l’année 1886.