Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lents. On achetait la terre, on ne la louait pas. En automne, on faisait venir de nombreux chevaux, et le labourage et les semailles se faisaient au moyen de formidables charrues et de gigantesques semoirs. Puis on envoyait les chevaux paître dans les montagnes ; on congédiait les hommes ; un seul homme, à l'occasion deux ou trois, hivernait dans la ferme. Au printemps, les agents du propriétaire commençaient à battre les auberges à trente lieues à la ronde et embauchaient pour la moisson des hommes de peine et des vagabonds que l'Europe fournissait généreusement. Des bataillons d'ouvriers étaient ainsi amenés sur les champs de blé. On les y campait, on ramenait les chevaux des montagnes, et en une semaine ou deux la récolte était coupée, battue, vannée, mise en sacs par des machines inventées spécialement à cet effet, et envoyée au prochain « elevator » (entrepôts pour les grains que l'on voit presque à chaque station des chemins de fer qui intersectent en lignes parallèles les « régions de froment, » — les wheatbelts du Canada et des Etats-Unis), ou bien par la voie des grands lacs pour être expédiée en Europe. Ensuite, on remerciait de nouveau les ouvriers, les chevaux retournaient aux pâturages ou étaient vendus, et seuls deux ou trois hommes restaient à la ferme.

Le rendement était faible, mais les machines étaient si perfectionnées et l'organisation si sim-