Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/229

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armées, etc. La somme de travail nécessaire pour se procurer ce qu'il faut pour vivre est si petite, lorsqu'on emploie des méthodes de culture rationnelles, que nos habitants seraient nécessairement amenés à employer leurs loisirs à des travaux industriels, artistiques, scientifiques ou autres.

Au point de vue technique, rien n'empêche qu'une telle organisation soit créée demain et fonctionne avec un plein succès. Les obstacles ne sont ni dans l'imperfection de la science agricole, ni dans l'infertilité du sol, ni dans le climat. Ils sont uniquement dans nos institutions, dans nos héritages et nos survivances du passé, — dans les « Revenants » qui nous étouffent. À ceux-là il faut seulement ajouter, si l'on considère la société dans son ensemble, notre phénoménale ignorance. Nous autres civilisés, hommes et femmes, nous savons tout, nous avons des opinions arrêtées sur tout, nous nous intéressons à tout. Mais nous ignorons comment vient le pain que nous mangeons, — encore que nous prétendions connaître à fond ce sujet, — nous ignorons comment on fait pousser le blé, quelle peine cette culture donne aux paysans, ce qu'on peut faire pour diminuer leur labeur, quelle espèce de gens sont ces hommes qui procurent la nourriture à nos intéressantes personnes... Nous sommes sur tous ces points plus ignorants que le dernier des sauvages, et nous empêchons