Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/382

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tangibles par l'intermédiaire de simples représentations graphiques, au lieu de leur faire faire ces choses eux-mêmes, nous leur faisons perdre un temps des plus précieux ; nous fatiguons inutilement leur esprit ; nous les habituons aux pires disciplines intellectuelles ; en les dressant à apprendre de confiance, à se fier au livre, aux autorités, nous étouffons dans le germe toute pensée indépendante ; et ce n'est que très rarement que nous réussissons à faire apprendre réellement ce que nous enseignons. La superficialité, le psittacisme, la servilité et la paresse d'esprit, — cette peste de notre époque, — voilà les résultats de nos méthodes d'éducation. Nous n'inculquons même pas à nos enfants l'art d'apprendre.

Dès les débuts, les premiers éléments de toutes les sciences sont déjà enseignés selon ce pernicieux système. Dans la plupart des écoles on enseigne l'arithmétique elle-même d'une façon abstraite, et ce n'est que de règles que l'on bourre la tête des pauvres petits. L'idée d'une unité, toujours arbitraire et pouvant être changée à volonté au cours de nos mensurations (l'allumette, la boîte d'allumettes, la douzaine de boîtes, ou la grosse ; le mètre, le centimètre, le kilomètre, etc.), n'est point imprimée dans l'esprit. En Angleterre, aux États-Unis, en Russie, au lieu d'accepter le système décimal, on torture encore les enfants en leur faisant étudier un système saugrenu de poids et mesures qui