Page:Kropotkine Champs, usines et ateliers.djvu/416

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trop souvent, écrasés sous le poids de l'Église, de l'État, de la concurrence commerciale, de la paresse d'esprit et du préjugé.

Et maintenant, en présence de toutes ces conquêtes, où en sont réellement les choses ?

Les neuf dixièmes de la population totale des nations qui exportent en grand leurs céréales, comme la Russie, et la moitié, dans les nations, comme la France, qui vivent des produits récoltés dans le pays même, sont occupés au travail de la terre ; et la plupart travaillent encore à la façon des esclaves antiques, se bornant à demander une maigre moisson à un sol qu'ils ne peuvent pas plus améliorer que leurs machines agricoles, parce que l'impôt, le fermage et l'usure les maintiennent autant que possible à la limite de la misère. Ainsi, même au dix-neuvième siècle, des populations entières labouraient avec la même charrue que leurs ancêtres du moyen âge et vivaient dans la même incertitude du lendemain, dans la même impossibilité d'acquérir la moindre instruction. Et quand ces paysans réclamaient leur part de pain, il leur fallait marcher avec leurs enfants et leurs femmes contre les baïonnettes de leurs propres fils, ainsi qu'avaient fait leurs pères cent ans et deux cents ans auparavant.

Dans les pays où l'industrie est déjà développée, et où les machines agricoles et les engrais pourraient être à la portée de tous, deux mois de