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Page:Krudener - Valerie.djvu/107

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après cela, si je ne sais pas l’aimer avec cette résignation qui seule excuse peut-être un peu ce funeste amour !

Mais il me reste à te détailler ce qui suivit cette première partie de la fête. À peine fûmes-nous dix minutes dans cette salle, les uns assis au milieu des fleurs, les autres parlant à voix basse, tous paroissant aimer cette scène tranquille qui sembloit offrir à chacun quelques souvenirs agréables, que la toile du fond se leva ; une gaze d’argent occupoit toute la place du haut en bas, elle imitoit parfaitement une glace. La lune disparut, et on vit à travers la gaze une chambre très simplement meublée, assez éclairée pour qu’on ne perdît rien, et une douzaine de jeunes filles assises auprès de leurs rouets, ou le fuseau à la main, travaillant toutes. Leur costume étoit celui des paysannes de notre pays ; des corsets d’un drap bleu foncé, un fichu d’une toile fine et blanche qui, se roulant comme un bandeau,enveloppoit pittoresquement leur tête, et descendoit sur leurs épaules avec des nattes de cheveux qui tomboient presque à terre. Ce tableau étoit charmant. Une des jeunes filles paroissoit se détacher de ses compagnes ; elle étoit plus jeune, plus svelte, ses bras étoient plus délicats ; les autres sembloient être faites pour l’entourer. Elle filoit aussi ; mais elle étoit placée de manière à ce qu’on ne vît pas ses traits. À moitié cachée par son attitude et par sa coiffure, elle étoit vêtue comme les autres, et paroissoit pourtant plus distinguée. Va-