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Page:Krudener - Valerie.djvu/272

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« Avec qui es-tu donc, mon fils, dans les courses solitaires ? » Il a tiré Ossian, et, d’un air passionné, il a dit : « Avec les héros, la nature et… — Et qui, mon fils ? » Il a hésité ; je l’ai embrassé. « Ai-je perdu ta confiance ? » II m’a embrassée avec transport. « Non, non ! » Puis il a ajouté en baissant la voix : « J’ai été avec un être idéal, charmant ; je ne l’ai jamais vu, et je le vois pourtant ; mon cœur bat, mes joues brûlent ; je l’appelle ; elle est timide et jeune comme moi, mais elle est bien meilleure. — Mon fils, ai-je dit avec une inflexion tendre et grave, il ne faut pas l’abandonner ainsi à ces rêves qui préparent à l’amour et ôtent la force de le combattre. Pense combien il se passera de temps avant que tu puisses te permettre d’aimer, de choisir une compagne ; et qui sait si jamais tu vivras pour l’amour heureux ! — Eh bien ! ma mère, ne m’avez-vous pas appris à aimer la vertu ? » J’ai souri et j’ai secoué la tête comme pour lui dire : Cela n’est pas aussi facile que tu penses ! « Oui, ma belle maman, la vertu ne m’effraye plus depuis qu’elle a pris vos traits. Vous réalisez pour moi l’idée de Platon, qui pensoit que, si la vertu se rendoit visible, on ne pourroit plus lui résister. Il faudra que la femme qui sera ma compagne vous ressemble, pour qu’elle ait toute mon âme. » J’ai encore souri. « Oh ! comme je saurois aimer ! bien, bien au delà de la vie ! et je la forcerois à m’aimer de même ; on ne résiste pas à ce que j’ai là dans le cœur ; quelque chose de si pas-