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l’orchestre

la nuance piano. C’est un chant d’extase amoureuse, – la mélodie en est empruntée au chant de concours de Walther (3me  acte – et non un thème de marche. Il suit de là, aussi, que les thèmes secondaires qui se combinent avec lui doivent demeurer au second plan, tout en étant perceptibles. Le sentiment qui domine ici est celui d’une effusion lyrique. Celle-ci est interrompue pendant quelques mesures par un retour du thème ironique de Beckmesser, mais reprend bientôt son élan au con fuoco, où s’exprime avec feu l’enthousiasme du poète, chantant l’hymne triomphant à la beauté et à l’amour. En un mot, ce long développement n’est tout entier qu’un seul et même crescendo continu préparant la rentrée fortissimo dans tout l’orchestre des cuivres, de la fanfare éclatante de la Marche des Maîtres.

Wagner dans ses explications sur l’exécution de ce prélude, déclare très nettement que dans toutes les parties essentiellement lyriques, il laisse libre cours au sentiment des exécutants, c’est-à-dire qu’il n’arrêtait pas la tendance naturelle qu’ils ont de presser un peu le mouvement dans les passages chantés et passionnés. La rentrée de la fanfare et du thème de marche lui permettait ensuite de revenir insensiblement au mouvement modéré du 4/4 initial. Ainsi faisait aussi M. Richter. Tout le développement sur le thème de Walther et le crescendo s’animait peu à peu, et la fanfare même, très franchement attaquée, avec les curieux traits de violons qui l’enguirlandent, avait sous sa direction une allure très gaie, très joyeuse. C’est seulement à la seconde reprise de la fanfare, au molto pesante, que M. Richter retenait le mouvement, donnant une grande largeur au