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Page:Kufferath - Tristan et Iseult, 1894.djvu/26

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« J’ai un autre projet curieux au sujet de Tristan. Je songe à faire faire de ce poème une bonne traduction italienne et à l’offrir au théâtre de Rio-de-Janeiro, où il serait joué pour la première fois. Je dédierais la partition à l’empereur du Brésil, et tout cela, je pense, aurait de bons résultats pour moi. »

Dans ses confessions relatives à la composition et à l’exécution des Nibelungen[1], il va plus loin encore, et déclare qu’en composant Tristan, il songeait à des chanteurs italiens ; et il raconte comment, dix ans plus tard, relisant un jour la partition devant quelques amis, il ne put s’empêcher de s’amuser avec eux de la naïveté de cette idée.

Je n’examinerai pas, dès à présent, jusqu’à quel point des influences italiennes peuvent, en effet, se retrouver dans la partition de Tristan ; il en sera question dans le chapitre spécialement consacré à celle-ci. Je me borne ici à noter une circonstance qui se rattache à la conception même de l’ouvrage.

Celle-ci appartient tout entière à la dernière période du séjour du maître à Zurich. En dépit des difficultés matérielles auxquelles il fut si souvent en proie pendant cet exil, ce fut, en somme, l’une des époques les plus heureuses de sa vie. Libre de tout emploi absorbant et pouvant vivre pour l’art seul ; entouré d’un cercle infiniment supérieur à celui de Dresde et qui se composait d’hommes tous remarquables dans leur spécialité, tels que

  1. Epilogue sur les circonstances qui ont entouré la composition et l’exécution de la tétralogie des Nibelungen, à Bayreuth, dans les Gesammelte Schriften, tome vi, pages 379 et suivantes.