Page:L'œil ouvert ! - Bourassa et l'Anti-Laurierisme, 1911.djvu/46

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Avoir les mains nettes, pour un politicien, c’est pouvoir mettre son esprit, sa conscience, sous les yeux du public, c’est pouvoir étaler au grand jour ses actes politiques et prouver ainsi qu’il n’a rien à se reprocher.

Quant à M. Bourassa, il aurait pu tout aussi bien, se contenter de lancer le mot de Cambronne (c’est-à-dire le vrai et qui eut été plus conforme à son goût), et il n’aurait pas mieux réussi à réfuter l’accusation d’avoir mis dans sa caisse, l’argent de la ligue anti-réciprocitaire.

Et franchement, nous persistons à croire que M. Bourassa (au point de vue politique toujours) n’a pas les mains nettes.

Le chef nationaliste, depuis qu’il a quitté les rangs du parti libéral, a-t-il suivi la ligne droite ?

Non assurément. Le seul programme auquel il ait été fidèle depuis son hégire, est la lutte de corsaire, à coups d’insultes éhontées et de basses calomnies qu’il a entreprise contre le chef aimé et respecté du parti libéral, et ses principaux lieutenants.

De ce programme, il ne dévie pas. S’il change d’opinion, il accuse ses anciens amis d’avoir modifié la leur, afin de pouvoir, avec quelque semblant de raison, pouvoir leur en faire un crime. On ne peut l’accuser d’ignorer l’histoire ; en homme retors qu’il est, il la dénature à plaisir, et il croit pouvoir tout oser, certain qu’il y aura quelque jour des badauds pour l’applaudir. Il y a quelques années, on disait tout haut, que la clique castor-nationaliste puisait dans la caisse conservatrice. La chose, il convient de le dire, n’a jamais été tirée au clair ; mais l’accusation n’a été repoussée que très mollement, et les intéressés n’ont jamais songé à prouver qu’elle était mal fondée. Il est toujours resté des soupçons. On n’a jamais vu le feu, mais on sent encore la fumée.

Dans le cas actuel, M. Bourassa, encore une fois, n’a rien prouvé. Il s’est contenté de dire que le « Devoir » est libre, comme il est libre lui-même. Avouez que c’est vague. La réponse n’est pas satisfaisante.

La caisse du « Devoir » a engouffré $200,000. D’où viennent-ils ? Qui a fourni cet argent ? La caisse du journal est nette comme les mains de son directeur. Qu’est-ce que cela veut dire ? Serait-elle « nette » parce qu’on l’a déjà vidée ?

Et si elle est seulement nette comme les mains — les mains politiques si l’on peut dire — de M. Bourassa, ce n’est pas affirmer beaucoup. Le cher homme aura beau se laver les mains, il ne pourra jamais en effacer la tache de la trahison et de la plus infâme calomnie.

A. J.


LA BOMBE No 2


BORDEN — : Non, mais faut-y être, “bad lucky”, v’là la pluie qui mouille encore ma “fuse” !


Contradictions Bourassa.

BOURASSA CONTRE MONK


On sait que le principe fondamental de M. Monk, c’est le référendum pour toute question importante qui est soumise au parlement.

Pour lui, les députés reçoivent un mandat strictement limité, dent il leur est défendu de s’écarter, et ils n’ont le droit de voter sur une question que si elle a été préalablement soumise au jugement de leurs électeurs.

En pratique, M. Bourassa a admis ce principe dans les deux questions de la marine et de la réciprocité.

Mais, dans son discours de Joliette, le 10 juin 1911, il a posé un principe tout différent : Nous reproduisons du « Devoir » de lundi :

« Je le répète, les députés ne doivent pas être les esclaves de leurs commettants ; ils doivent être assez courageux pour tenir leur ligne de conduite propre, lorsque vous vous trompez, et vous rappeler à la saine notion des choses. »

Ainsi, d’après M. Bourassa, non seulement le député doit agir suivant sa conscience, même à l’encontre de l’opinion de ses électeurs ; mais encore s’ils se trompent, il doit les « rappeler à la saine notion des choses ».

Mais alors, que devient le principe de l’appel au peuple ?


BOURASSA POUR MONK


Le lendemain, à Sorel, changement de ton. M. Bourassa ne parle plus pour innocenter M. Borden de mépriser les avis des « Grain-Growers ».

Il parle pour combattre M. Lanctôt.

Le cas est différent, suivant qu’il s’agit d’un conservateur ou d’un libéral.

Voici maintenant ce qu’il a dit à Sorel, à quelques jours d’intervalles :

Il a cité une réponse de M. Adélard Lanctôt, député de Richelieu, à des électeurs qui lui demandaient de voter contre la loi de la marine. Voici cette lettre :

Ottawa, 15 février, 1910.
M. Isidore Tanguay,
Secrétaire,
Sainte-Anne de Sorel,
Monsieur,

J’accuse réception d’une résolution passée par un certain nombre d’électeurs de la paroisse de Sainte-Anne de Sorel, le 6 février courant, dans laquelle ils me demande de me prononcer contre le bill de la Défense Navale.