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Page:L'Abeille de Fontainebleau - 1944-08-11.djvu/1

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109e année
Numéro 32
11 AOÛT 1944
L'ABEILLE DE FONTAINEBLEAU
Journal de l'Arrondissement, fondé en 1835, paraissant le Vendredi soir
René CUËNOT : Directeur-Propriétaire, Successeur de Maurice BOURGES
Tél. 20.52 — Bureaux : 32, Rue de l'Arbre-Sec, FONTAINEBLEAU — Tél. 20.52
Compte C. P. PARIS 530.91 ANNONCES LÉGALES Reg. Com. Montereau 1.597 ter
Calme et Discipline

Devant les évènements, dont le cours peut surprendre, nombreux sont peut-être ceux qui ne savent plus que penser et surtout comment agir.

Il est, cependant, une règle bien simple, celle que nous n’avons jamais cessé de préconiser ici-même, et qui s’impose plus que jamais dans les moments troubles ou difficiles :

Suivre les ordres du Maréchal.

Le Maréchal Pétain est le seul chef légitime de la France.

En 1940, c’est lui qui l’a sauvée qui a conservé la souveraineté de la Patrie. C’est lui qui, depuis lors, n’a cessé de la diriger dans les voies de l’honneur et de la sagesse.

C’est lui, aujourd’hui comme hier, qu’il faut suivre, avec discipline.

Comme nous l’avons toujours dit ici, il ne faut pas vouloir aller plus vite ou plus loin que lui ; l’opinion ne doit pas plus chercher à pousser qu'à ralentir son action, mais se borner à suivre strictement ses directives.

Ses directives, ses ordres, il les a donnés le 6 juin. Nous les répétons à nouveau :

« Français,

Les armées allemandes et anglo-américaines sont aux prises sur notre sol. La France devient ainsi un champ de bataille.

Fonctionnaires, agents des services publics, cheminots, ouvriers, demeurez fermes à vos postes, pour maintenir la vie de la Nation et accomplir les tâches qui vous incombent.

Français, n’agravez pas nos malheurs par des actes qui risqueraient d’appeler sur vous de tragiques représailles. Ce seraient d’innocentes populations françaises qui en subiraient les conséquences. N’écoutez pas ceux qui, cherchant à exploiter notre détresse, conduiraient le pays au désastre. La France ne se sauvera qu’en observant la discipline la plus rigoureuse. Obéissez donc aux ordres du gouvernement. Que chacun reste face à son devoir.

Les circonstances de la bataille pourront conduire l’armée allemande à prendre des dispositions spéciales dans les zones de combat. Acceptez cette nécessité, c’est une recommandation importante que je vous fais, dans l’intérêt de votre sauvegarde.

Je vous adjure, Français, de penser avant tout au péril mortel que courrait notre pays si ce solennel avertissement n’était pas entendu. »


C’est clair, net et précis. Il n’y a rien à y ajouter.

La discipline et le calme sont les seuls devoirs de l’heure actuelle : la discipline envers le seul Chef légitime de la France.

René CUËNOT


AVIS

Par suite d’une décision du Groupement Corporatif de la Presse de Seine-et-Marne, aucun journal du département ne paraîtra dans la semaine du 13 au 20 août. Le numéro de L’Abeille du 18  août sera donc supprimé.

Secours National
Sous-Délégation de Fontainebleau

SINISTRÉS, RÉFUGIÉS, ÉVACUÉS

Voici ce que vous devez savoir :

OÙ VOUS ADRESSER ?

Pour tous les renseignements concernant votre situation vous pouvez vous adresser :

Soit à la Direction Départementale des Réfugiés à la Préfecture ;

Soit au Contrôleur Départemental des Réfugiés à la Préfecture ;

Soit à l’Aide aux Réfugiés Radiodiffusion nationale S. A. R. Chronique des Réfugiés hôtel Cécil Vichy.

Pour les dégâts causés aux Immeubles : Au Service régional du Commissariat à la Reconstruction.

Pour retrouver du travail : À l’Office Départemental du Travail (l’adresse vous en sera donnée à la Malle ou à la Préfecture).

Pour bénéficier de l'Assistance Médicale gratuite : À la Mairie.

Pour les Assurances sociales : Si vous avez changé de Département À la Caisse d’Assurances Sociales de votre choix dans le département où vous vous trouvez ; adressez-vous de préférence à une caisse de même désignation que celle à laquelle vous étiez inscrits (Caisse départementale Caisse mutualiste Caisse de Travail Caisse familiale Caisse professionnelle).

Pour les Pensions d’invalidité : À la Préfecture ; pour tous les renseignements complémentaires à l’Office National des Mutilés, Anciens Combattants et Victimes de guerre, 2, avenue de Tourville, à Paris.

Pour les questions de Loyer : Au Juge de Paix du canton où se trouve votre domicile.

Pour les questions d’Impôts : Concernant votre domicile habituel ; Au Directeur des contributions directes du département de votre domicile habituel. Concernant votre domicile de refuge : Au Directeur des contributions directes du département de votre domicile de refuge.


Situation Militaire

La situation militaire, cette semaine, a été marquée par la percée réalisée par l’armée américaine du général Bradley, à l’Est d’Avranches.

Par la brèche d’une vingtaine de kilomètres ainsi ouverte, les colonnes motorisées américaines se sont lancées en éventail à travers la Bretagne et ont même cherché à obliquer sur Paris, en direction de Laval et du Mans.

En Bretagne, jusqu’ici, les Américains n’ont pu occuper aucun point important. À Laval, ils ont été arrêtés, ayant pu pousser jusqu’à Château-Gontier et mercredi jusqu’au Mans.

Par contre, lundi, une contre-attaque allemande a été amorcée à Mortain, qui, mardi, avait déjà gagné une quinzaine de kilomètres en direction d’Avranches.

Au cas où cette contre-attaque réussirait à progresser encore vers l’Ouest, les pointes américaines se trouveraient coupées de leur base et leur situation deviendrait extrêmement critique.

La percée américaine semble s’expliquer parce que, du fait de l’amplitude des attaques anglo-américaines dans le secteur de Caen, il paraissait certain que le but des Anglo-Américains était la percée dans ce secteur et la poussée directe vers Paris.

Aussi, le gros des réserves allemandes était-il massé dans ce secteur.

La percée d’Avranches et le début de son exploitation ont bénéficié de la surprise et il a fallu deux ou trois jours à l’état-major allemand pour y faire face.

Mardi, dans le secteur de Caen, les Anglais sont passés à l’offensive, peut-être pour viser à l’obtention d’un résultat direct, peut-être seulement pour maintenir les réserves allemandes et les empêcher de se porter contre les Americains.

Sur le front de l’Est, les attaques des Soviets ont été brisées au Nord-Ouest de Mielec, en Lituanie, au Nord du Niémen, au Nord de la Duna et jusqu’au lac de Pskov.


L’arme V-2 aurait été expérimentée sur le front de l’Est, écrit le journal londonien Daily Telegraph.

Les destructions provoquées par le nouvel engin seraient telles que Churchill aurait demandé à Staline de lui communiquer, le plus tôt pos sible, tous les renseignements dont il pourrait disposer, afin de prendre les mesures de défense appropriées.


UNE DISSIDENCE DE LA DISSIDENCE

Des dépêches de Rabat signalent le mouvement insurrectionnel du général François, lequel dispose de 20.000 hommes, auxquels se sont joints plusieurs milliers d’insurgés marocains.

Le général François a pris contact avec d’autres insurgés, ceux du général Leclerc, en Algérie du Sud, soit plus de 5.000 hommes de troupes régulières.

Il semble que ces dissidences aient été provoquées par le fait de la dépendance où de Gaulle est ouvertement tombé vis-à-vis de Moscou.

En tout cas, comme il est normal, le désordre et la désobéissance ne peuvent engendrer que le désordre et la désobéissance.


Chronique Locale

Marie-Françoise et Jean-Jacques HYEST ont la joie de faire part de la naissance de leur petit frère Claude, le 8 août.

Clinique du Docteur Vazeux ; 122, rue Saint-Merry, Fontainebleau.


À L’HOPITAL
Hommage à Me HEQUET

En ouvrant le séance de la Commission Administrative à l’Hôpital le 9 août son Président M. le Maire J.-L. Dumesnil a prononcé une allocution pour rendre un hommage ému à la mémoire de Me Édouard Héquet vice-président de cette Commission dont il faisait partie depuis le 5 février 1921 c’est-à-dire depuis 23 ans.

Il a rappelé le grand attachement du défunt aux fonctions qu’il remplissait avec un zèle, une persévérance et un dévouement incomparables et la haute compétence qu’il manifesta dans le contrôle de la gestion tant administrative que financière de l’Établissement ainsi que sa sollicitude pour les malades et les vieillards. Le souvenir de cet excellent collègue, de cet homme au grand cœur conclut le Président demeurera parmi nous et continuer à guider nos travaux.

Les membres de la Commission administrative se sont unanimement associés à cet hommage mérité, en ont décidé l'inscription au procès-verbal et ont chargé leur Président de se faire leur interprète auprès de Mme Héquet et de sa famille.

La séance fut ensuite suspendue quelques instants en signe de deuil.


Mardi dernier, plusieurs bombes ont été lancées, au début de l’après-midi, sur Changis. Heureusement, il n’y a pas de victimes à déplorer, mais de simples dégâts matériels.


Lundi 7 courant, vers 13 <abbr class="abbr" title="heure">h. 05, la commune de Bourron a été victime d’une nouvelle attaque aérienne, la troisième depuis peu de temps.

On note environ une centaine de points de chute, dont près de la moitié dans le centre de l’agglomération.

Une quarantaine de maisons ont été atteintes : il y a à déplorer 4  morts, 3 blessés graves ont été transportés à l’hôpital de Fontainebleau, tandis qu’une douzaine de blessés légers étaient soignés sur place.

La Gendarmerie, le Secours National et la Croix-Rouge se sont immédiatement rendus sur les lieux pour prendre toutes dépositions utiles.

Les premiers travaux de déblaiement ont été assurés par les équipes locales, tandis que, dans la soirée, les équipes d’urgence entraient en action.

À signaler la bonne tenue de la population locale et l’excellent esprit d’entr’aide qui a joué immédiatement après l’épreuve.

Parmi les morts, il faut signaler les noms de Me Lacan, du barreau de Paris, bien connu dans notre région, et de sa belle fille, qui habitaient une propriété à Bourron.


Ont eut lieu, à l’Église Notre-Dame, à Melun, les obsèques des dix-sept victimes du bombardement du 3  août. L’absoute a été donnée par le Chanoine Demars, curé de Notre-Dame, en présence de M. Perrin, Secrétaire Général de la Préfecture, du marquis de Mun, Président général de la Croix-Rouge Française ; de Mme Sommier, vice-présidente ; de M. Houdart, maire de Melun, des autorités d’occupation, etc.


Les mesures de restriction de l’électricité doivent être strictement observées

Malgré des avis réitérés, parus dans la presse, il est constaté que certains établissements industriels, commerciaux, artisanaux et coopératifs continuent à consommer de l'énergie électrique sans autorisation spéciale.

Il est rappelé, une dernière fois, à ces abonnés que la règlemenation en vigueur leur interdit toute consommation, de jour comme de nuit, et qu’ils s’exposent aux sanctions les plus graves.

La situation de la production de l’énergie électrique est actuellement trop sérieuse pour qu’il soit toléré des actes d’indiscipline, et il est nécessaire que les mesures prises soient strictement observées : pour permettre le maintien en fonctionnement des services vitaux du pays.


EXPOSITION

du peintre Courtès

à la Galerie Masson

Courtès est un vrai peintre de l'Île-de-France. Nul mieux que lui m'en a chanté le charme, la tranquilité, la douceur. Déjà, la critique avait fort vivement remarqué ses envois au Salon de « La Petite École de Fontainebleau », organisé, rue de la Boétie, par cet excellent artiste qu’est non moins M. Régner.

Du 7 au 27 août, le grand public Bellifontain n'aura sous les yeux, à la Galerie Masson (31, rue des Sablons), la plus belle manifestation du talent sincère et éprouvé de Courtès : soixante toiles et gouaches qui, malgré toutes les difficultés de l’heure, ont pu être transportées de l’atelier de l’artiste à Fonta’nebleau.

Courtès est très Artiste Français, ceci pris dans le sens le plus élogieux du terme. N’insistons donc point sur le fait qu’il sait aussi bien dessiner que peindre, ce qui serait un pléonasme, mais soulignons qu’en aucun cas, il n’escamote la difficulté. Dans ses paysages, il y a des personnages et non des quilles, comme l’on dit en expression de métier, et ces personnages ont du mouvement. Pour preuve, nous n’en apporterons que son Pressoir, d’une lumière tamisée qui lui permet toute la gamme des gris sombres avec les plus justes rapports de tons. Sa Rue de village, avec ses taches d’ombre, de soleil (nous dirons aussi de chaleur, car la peinture est également une chose qui se sent) et que traverse une charrette.

Ceci tient à la représentation un peu anonyme de l’Île de France, mais voici plus précis, avec la Rue du Presbytère à Melun, peinte par beau temps de Juillet, et l’Église St-Aspais, telle vraiment d’une qualité exceptionnelle.

Courtès joue admirablement de la lumière. Toutes ses huiles comme ses gouaches en sont imprégnées. De là leur vient cette fraîcheur intense. Ses Matin d’été sur la Seine et Matin au bord de l’eau, s’ils sont différents de format, sont d’une égale qualité : une grande qualité. Et bien que cette fois dans les tonalités du soir, on ne se trouvera pas moins conquis, et poétiquement conquis, par son rustique et si véridique Lever de lune en novembre.

Il y a, à la Galerie Masson, bon nombre encore de paysages d’hiver, traités à la gouache et qui émeuvent délicieusement. Paris se trouvant en Ile de France, Courtès ne manque pas de lui rendre l’hommage qui lui est dû par la représentation prestement enlevée d’un de ses coins les plus familiers : le Quai des Grands-Augustins, avec Notre-Dame : une pochade, mais une pochade de haut style. Et si nous avions quelques fleurs, fleurs largement méritées, à jeter encore à ce probe et bon artiste qu’est le peintre Courtès, nous prendrions celles de sa gouache Bouquet de fleurs des champs, d’une facture large, par taches, et d’une couleur si jolie.

René VIRARD


Bibliographie

LES BIPEDES
par Ambroise Yxemerry

On peut tirer beaucoup de choses d’un crâne. Ne parlons pas du sien propre, ce qui va de sol, mais de celui d’un tiers, réduit à l’état de pièce anatomique et dont, selon son ingéniosité, on se sert comme d’un pot à tabac ou d’une garniture de cheminée.

Le crâne qui a échoué chez M. Ambroise Yxemerry remplit, sur le bureau de l’auteur de Kerfantan le Breton le double offre de presse-papier et de confident. Aussi Les Bipèdes[1] auraient-ils pu aussi bien s’appeler « D'alegues avec une tête de mort ». Seulement, ça n’aurait peut-être pas dit tout ce que le livre veut dire.

  1. Aux Éditions René Debresse. Un vol. 40 fr.