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Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/115

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ouvertes au second étage. Elles contrastaient vivement avec les hautes ogives gothiques qui flamboyaient au-dessous. La délicieuse dissymétrie de cet Hôtel de Ville, presque égale à celle du Palais des Doges, se devine encore quand on regarde les ruines des arcades si exactement dessinées par M. Duvent. On sent qu’elles s’ouvraient selon des courbes toutes différentes : l’arc en tiers-point et le plein-cintre, alternant sur des colonnes inégalement espacées, sauvaient les sept arcades de l’inévitable ennui d’un plan régulier. Peut-être cela gênait-il M. Hoffmann, l’architecte municipal de Berlin, ou M. Peter Behrens. L’ordre règne maintenant dans le style ogival d’Arras : il n’y a plus rien.

Comment c’est-il arrivé ? C’est M. Flameng qui va nous le dire. Il a peint le même motif, mais vu un mois auparavant, et vu d’un autre point : du pan de mur qu’on aperçoit, à l’extrémité gauche dans l’aquarelle de M. Duvent Peintre de batailles, il a saisi la Ruine au moment où elle se fait. On croit entendre le bruit sourd de la masse qui s’éboule, on croit respirer cette poussière acre qui flotte dans l’air pendant l’incendie. L’écorce sombre des pierres, patinées par le temps, se détache et tombe ; la bâtisse primitive, l’appareil du xve siècle, est mis à nu : c’est une minute rare pour l’œil de l’artiste.

Lorsque le dernier étage du Beffroi d’Arras avait été terminé, jadis, un poète du lieu était venu en