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Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/126

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au-dessus des draperies sculptées, les trois prophètes Isaïe, Malachie, David, déroulant leurs phylactères. Au-dessus, on devine l’ange apparaissant à Anne et Joachim ; au-dessus encore, on sait qu’il y a Anne et Joachim se rencontrant à la Porte d’Or. On est confondu de cette profusion de figures très étudiées dans des coins où nul ne les voyait. Aujourd’hui, l’obus a déblayé la place. Le feu a pris aux grands tambours de bois qui masquaient les portes. Nous voyons le résultat. Et il ne faut pas juger du désastre seulement par les choses qui se sont écroulées. Presque toutes les autres sont calcinées. L’épiderme de la pierre ne tombera-t-il pas au premier choc ? On ne mesurera que dans longtemps l’étendue de la catastrophe…

Nous touchons ici au crime, non pas le plus inhumain, mais le plus inexplicable qui ait jamais été commis par des êtres qui avaient figure humaine et dont la langue assemblait des sons ! Lorsque le télégraphe, dans les heures anxieuses de septembre 1914, nous apporta la nouvelle que l’Allemand détruisait la cathédrale de Reims, le cri fut moins d’horreur que de stupéfaction. Ce fut moins la sensibilité qui fut blessée que l’intelligence, par l’impossibilité où elle était, — où elle est toujours, — de comprendre. Détruire les demeures de l’ennemi, souffler une rafale de fer et de feu qui emporte les toits et rend une ville inhabitable, c’est une opération conforme au système