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Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/164

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le sol, mais dans ce sol, je dois préparer un terrain libre pour les immigrants qui arriveront du pays natal. »

En Italie, la caricature, d’abord neutre puis alliée, est beaucoup moins amère. Elle est aussi moins saisissante du point de vue graphique. La légende y est toujours très supérieure au dessin. Le peuple le plus fin du monde n’est jamais à court d’esprit, mais son art, toujours orienté vers le Beau, n’a jamais condescendu à s’appliquer aux menues besognes de la catagraphie. C’était vrai déjà du temps de Léonard, dont les caricatures sont de simples « charges » et n’ont rien de psychologique. Les peuples et les époques d’art idéaliste ne connaissent point la caricature fine et nuancée : elle n’apparaît que chez les peuples et aux époques d’art réaliste.

Toutefois, l’idée satirique suffit pour rendre son signe précieux. Telle est celle des deux rats figurés par le Pasquino, de Turin, dans les premiers jours de guerre. C’est le Rat de Paris et le Rat de Berlin, en face l’un de l’autre, des deux côtés du Rhin et songeant aux invasions et aux sièges futurs : « Lequel de nous aura l’honneur de servir de comestible ? » Lorsque, plus tard, il est question, pour l’Italie, de prendre part au conflit, le Numero, de Turin, résume ainsi l’attitude de l’Allemagne. Un Prussien tient dans sa main une marionnette qui a la tête d’un Turc et, de ses doigts cachés sous la figurine, lui fait manœuvrer un sabre de bois, le tout pour effrayer la pauvre petite Italie,