Aller au contenu

Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

les âmes, des « harmoniques » aussi longues, quasi infinies. Ainsi, ce n’est pas la guerre qui a tant changé : c’est nous, — nous tous à l’exception des Allemands, lesquels semblent être restés contemporains des époques où ces sacrilèges paraissaient naturels à tout le monde. Vainement, avaient-ils accumulé, — sans doute pour donner le change au monde civilisé, — leurs écoles d’art, leurs instituts ou missions archéologiques et l’innommable fatras de leur érudition sans lumière et de leur esthétique sans tendresse : ce n’était qu’une façade. Des canons Krupp étaient derrière, prêts à bombarder les cathédrales si savamment décrites par eux en ces monographies, qui apparaissent maintenant ce qu’elles étaient réellement : des nécrologies. À la lueur des incendies de Reims ou d’Amiens, tout le monde aperçoit ce que la lecture de leurs ouvrages sur l’Art aurait suffi à nous révéler : une indifférence profonde et peut-être une haine secrète pour la Beauté.

On comprend que ces Ruines nous soient doublement chères. Aussi, est-ce la première fois qu’on a eu l’idée de faire des tableaux entiers et pour ainsi dire des « portraits de ruines ». M. Duvent, M. Vignal, M. Flameng, M. Mathurin Méheut, M. Louis Arr en ont donné d’excellents exemples. On y voit des défilés d’architectures écroulées, jusqu’à l’horizon, un rêve ou plutôt un cauchemar de Piranèse, des choses pyramidales et dentelées comme une chaîne des Dolomites, calcinées et titu-