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Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/251

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cher du soleil, à travers ses nombreuses péripéties, graduées pour soutenir l’intérêt, qui obéissait, en un mot, à la règle des trois unités : lieu, temps et action. Parfois, il est vrai, la bataille s’y conformait dans le récit mieux que dans la réalité : il n’était pas rare que le grand chef la composât, après coup, comme une tragédie classique, après l’avoir livrée au petit bonheur comme un pot-pourri. Mais elle se laissait faire, et très souvent elle se composait d’elle-même aux yeux des témoins. Il est évident, par exemple, que des actions ramassées et précises comme celles de Fontenoy ou d’Austerlitz se dessinaient sur le terrain avec une netteté suffisante pour que le peintre n’eût qu’à les reproduire telles quelles. Blaremberghe a pu faire voir, comme les habitants de Tournay l’avaient vu, le 17 mai 1745, l’action des escadrons blancs et bleus du maréchal de Saxe, disloquant l’énorme colonne rouge du duc de Cumberland, après que les canons, visibles aussi, y avaient pratiqué une entaille. Horace Vernet a pu montrer, dans son Montmirail, le mouvement de la vieille garde abordant en colonnes serrées la garde impériale russe, et quant aux manœuvres fameuses qui amenèrent jadis l’écrasement de la Prusse et de l’Autriche, elles ont quelque chose de si plastique et de si défini, qu’on a pu parler de l’« Esthétique napoléonienne ».

Aujourd’hui, les batailles sont gigantesques, interminables et amorphes. Personne ne les voit plus se développer sur le terrain, ni les armées évo-