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Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/272

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au secours de la civilisation, et qui exerce si fort la verve du Simplicissimus, n’est pas seulement une démonstration éclatante de l’horreur qu’inspire le Pangermanisme jusqu’aux confins extrêmes du monde habité : c’est une bonne fortune pour le peintre. Jamais il n’a eu sous les yeux telle abondance de modèles. Jamais il n’a pu si aisément faire une étude comparative des caractères de races. On ne voit guère que Venise, au xvie siècle, qui ait fourni à ses artistes quelque chose d’approchant, mais sur une bien moindre échelle.

Tous ces exemplaires inconnus de la grande famille humaine, vivant longtemps parmi nous, offrent à l’artiste une occasion unique de les observer au travail, au repos, au danger, à la mort, au plaisir. Quand ils sont à la soupe et à la corvée, il voit comme ils mangent, comme ils palabrent et comme ils s’efforcent ; au service divin, au cinématographe, à l’assaut, il voit comme ils prient, il voit comme ils rient, il voit comme ils tuent. Les différences dans l’angle facial, le port de tête, la souplesse et le jeu des muscles, l’aptitude plus ou moins grande à se plier, à se ramasser, à bondir, à mesurer le geste à son objet, l’expression à son sentiment, l’effort à son but : — tout ce qui exige une action et une action violente pour se trahir est infiniment plus facile à observer, à la guerre dans les moments où toutes les virtualités sont en jeu, que chez un modèle prenant une pose à l’atelier. Bien entendu, seuls les artistes qui sont