Page:L'affaire du Tonkin.pdf/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
2
L’AFFAIRE DU TONKIN.

Le 25 avril 1882, Henri Rivière, commandant notre station navale de Cochinchine, s’était emparé de la citadelle de Hanoï.

On avait applaudi à l’exploit du brillant officier, qui venait, avec 500 hommes, d’enlever une place fortifiée, défendue par plusieurs milliers de soldats et armée d’une puissante artillerie. On n’ignorait pas que le Gouvernement étudiait de nouvelles opérations destinées à asseoir solidement notre influence sur l’Annam. Mais personne n’élevait la voix pour demander le rappel de nos troupes ; personne ne conseillait de recommencer la liquidation où s’étaient effondrés les résultats de l’expédition de Francis Garnier.

L’étude attentive de tous les éléments alors connus de la situation démontrait, d’une part, que nous étions engagés de manière à ne pouvoir reculer sans dommage pour notre prestige et pour nos intérêts en Orient ; d’autre part, que nous avions à tenir compte de la Chine, comme d’un facteur important dans le règlement de la question.

Les complications survenues dans nos rapports avec l’Annam étaient la conséquence fatale de l’état de choses créé par le traité franco-annamite du 15 mars 1874. — Par cet acte nous avions reconnu l’entière indépendance de l’Annam vis-à-vis de toute Puissance étrangère, et nous nous étions engagés à lui donner l’appui nécessaire pour maintenir l’ordre à l’intérieur et pour se défendre contre toute attaque. En retour, l’Annam s’était obligé à conformer sa politique extérieure à la nôtre.

Les contractants n’avaient pas tardé à être en désaccord sur la portée de leurs engagements. L'Annam n’y voyait qu’un traité d’amitié et d’alliance éventuelle. Nous estimions, au contraire, que le traité constituait à notre profit un protectorat', puisqu’il nous conférait à la fois la charge de défendre le royaume contre toute agression et le droit de diriger sa politique extérieure.

Ne sont-ce pas là, en effet, les véritables attributs du protectorat ? Au point de vue conventionnel, notre thèse était incontestable et fournissait une base juridique à nos revendications. Il était toutefois regrettable que la rédaction du traité ne fût pas plus explicite,