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JUIN 1916


— Enterrement Galliéni. À midi, au moment où il me faut traverser le boulevard Saint-Germain, la foule garnit les trottoirs. Des chaises, des échelles, des bancs. Des gens bouffent. Une femme vomit. On est gai : « Vous allez voir le cortège ? » Ou bien : « Et on dit qu’il n’y a personne à Paris ! » On loue des fenêtres à 20 francs la place.

Vers six heures, la triste fête, que j’ai pu éviter, est finie. Je croise un soldat qui emmène par la bride un cheval sans cavalier, un cheval de général, garni d’une selle de velours, de peau de tigre et d’or. Quinze personnes suivent, héroïques. Un jeune homme, qui parle au soldat, éclate de gloire, d’orgueil, d’extase. Ça explique toute la guerre, cette vue-là.

— Le 2. Painlevé me ramène en auto d’un déjeuner offert, par les Belges, à l’hôtel Meurice, au Comité Interallié. Il est inquiet. Un radio allemand annonce une bataille navale dans les eaux danoises. Trois navires anglais seraient coulés. Painlevé veut s’arrêter au ministère de la Marine. À son retour, il dit que les Anglais ont ordonné à leurs navires de ne pas télégraphier par T.S.F. Aussi les renseignements sont-ils incomplets. Il semble, une fois de plus, qu’il y ait partie nulle.