Page:L'envers de la Guerre - Tome 1 - 1914-1916.djvu/26

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Dans les gares, on voit aux kiosques à journaux de pimpantes publications illustrées, toutes arrêtées au numéro d’août, comme les affiches de théâtre sur les colonnes Morisse à Paris.

Je cause une partie de la nuit avec un petit sous-lieutenant revenant du front. Il descend à 4 heures du matin. Une jeune fille arrive sur lui comme une balle et se soude à lui… Oh ! tant d’amours, celles des mères, des sœurs, des épouses, des amantes, ont donc été impuissantes contre tant de haines !

— Cette guerre aura bien montré que l’officier de réserve et de territoriale a donné autant que l’officier d’active. Et cependant il est à craindre que l’officier professionnel ne continue d’avoir seul le prestige, alors que le commerçant, le bureaucrate, devenus officiers, auront couru les mêmes risques.

— Il faudrait, pour rester juste, se transférer de temps en temps dans l’âme ennemie.

— Je vois bien le malentendu entre l’opinion générale et la mienne. Le dogme, c’est que l’Allemagne a attaqué la France. Alors, tout de nous est justifié, la guerre est embellie, elle est sainte, elle nous fait honneur. Seulement, cela s’est-il passé si simplement ?

Et alors, au lieu de dire de la guerre : « Quelle cochonnerie ! » on aime mieux dire des Allemands : « Quels cochons ! »

— Mon petit neveu Claude veut « couper la tête des Boches » (ce mot de Boche pour Allemand a pris avec rapidité). Il a cinq ans, son éducation se fait. La haine descend en cascade les générations. Il est vrai que, étant dans le Cher, il ajoute : « N’est-ce pas, ils sont encore loin, maman ? »

— L’esprit français le plus répandu se refuse à