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L'HOMME, CET INCONNU

est moins fatigant de travailler dans une usine ou un bureau que dans les champs. Et même dans les fermes, la dureté de l'existence a été très diminuée par les machines. Les maisons modernes nous assurent, une vie égale et douce. Par leur confort et leur lumière elles donnent à ceux qui les habitent le sentiment du repos et du contentement. Leur agencement atténue aussi beaucoup l'effort demandé autrefois par la vie domestique. Outre la diminution de l'effort et l’acquisition du bien-être, les êtres humains ont accepté avec bonheur la possibilité de ne jamais être seuls, de jouir des distractions continuelles de la ville, de faire partie de grandes foules, de ne jamais penser. Ils ont apprécié également d’être relevés, par une éducation purement intellectuelle, de la contrainte morale imposée par la discipline puritaine et par les règles religieuses. La vie moderne les a vraiment rendus libres. Elle les engage à acquérir la richesse par tous les moyens, pourvu que ces moyens ne les conduisent, pas devant les tribunaux. Elle leur a ouvert toutes les contrées de la terre. Elle les a affranchis de toutes les superstitions. Elle leur permet l'excitation fréquente et la satisfaction facile de leurs appétits sexuels. Elle supprime la contrainte, la discipline, l'effort, tout ce qui était gênant et pénible. Les gens, surtout dans les classes inférieures, sont matériellement plus heureux qu'autrefois. Beaucoup, cependant, cessent peu à peu d'apprécier les distractions et les plaisirs banaux de la vie moderne. Parfois leur santé ne leur permet pas de continuer indéfiniment les excès alimentaires, alcooliques et sexuels auxquels les entraîne la suppression de toute discipline. En outre, ils sont hantés par la crainte de perdre leur emploi, leurs économies, leur fortune, leurs moyens de subsistance. Ils ne peuvent pas satisfaire le besoin