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L'HOMME, CET INCONNU

de parties qu’il est nécessaire pour faire de chacune d'elles un inventaire complet. Mais nous devons réaliser en même temps que cette division n’est qu’un artifice méthodologique, qu’elle est créée par nous, et que l’homme demeure un tout insécable.

Il n’y a aucun territoire privilégié. Dans l'immensité de notre monde intérieur, tout a une signification. Nous ne pouvons pas y choisir seulement ce qui nous convient, au gré de nos sentiments, de notre fantaisie, de la forme scientifique et philosophique de notre esprit. La difficulté ou l'obscurité d'un sujet n’est pas une raison suffisante pour le négliger. Toutes les méthodes doivent être employées. Le qualitatif est aussi vrai que le quantitatif. Les relations exprimables en langage mathématique ne possèdent pas une réalité plus grande que celles qui ne le sont pas. Darwin, Claude Bernard et Pasteur, qui ne purent pas décrire leurs découvertes à l’aide de formules algébriques, furent d'aussi grands savants que Newton et Einstein. La réalité n’est pas nécessairement claire et simple. Il n’est même pas sûr qu’elle soit toujours intelligible pour nous. En outre, elle se présente sous des formes infiniment variées. Un état de conscience, l'os humérus, une plaie, sont des choses également vraies. Un phénomène ne tient pas son intérêt de la facilité avec laquelle nos techniques s'appliquent à son étude. I] doit être jugé en fonction, non pas de l'observateur et de ses méthodes, mais du sujet, de l’être humain. La douleur de la mère qui a perdu son enfant, la détresse de l'âme mystique plongée dans la nuit obscure, la souffrance du malade dévoré par un cancer, sont d’une évidente réalité, bien qu’elles ne soient pas mesurables. On n’a pas plus le droit de négliger l'étude des phénomènes de clairvoyance que celle de