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Page:L'oeuvre du Divin-Aretin - Partie I.djvu/16

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INTRODUCTION

mais pour se consoler en écrit des parodies. L’influence de ces faciles écrits se fait sentir non seulement en Italie, mais en France, en Espagne, en Allemagne. Il règle le goût, s’intéresse aux artistes et entasse chez lui les œuvres d’art.

À peine à Venise, il rencontre le Titien, qui devient son compère, et commence immédiatement son premier portrait qui, trois mois après, fut envoyé au marquis de Mantoue. L’amitié du peintre et du Divin ne devait plus cesser. Parmi ses amis on peut citer encore le Sansovino, Sébastien del Piombo, le Sodoma, Jules Romain, Giovanni da Udine et même Michel-Ange qui, s’il semble n’avoir jamais voulu donner de ses œuvres à l’Arétin, qui sollicitait ce don, n’en tenait pas moins le Fléau des Princes en haute estime, écrivant : « Le Roi et l’Empereur avaient en très grande grâce que la plume de l’Arétin les nommât. »

Dans le palais qu’il habitait se pressait chaque jour la foule des artistes, des disciples, des patriciens, des aventuriers, des ecclésiastiques, des mérétrices, des ganymèdes et des étrangers. L’Arétin plaisante et rit souvent à gorge déployée. Il est l’homme le plus libre du monde, il ne craint personne. Il reçoit des présents de tous les souverains. François ier et Charles-Quint lui ont donné des chaînes d’or mais ne l’ont point enchaîné. Il se croit le droit de changer de parti. Il a conscience de sa puissance. Et, seul parmi les gens de lettres de son temps, il n’est pas parasite. On a dit que c’était un maître-chanteur, mais on a exagéré. Il a des talents et peut rendre des services. Il n’est que trop juste qu’on les lui paye. Il ne ménage rien et dit hardiment sa pensée. Il a reproché au roi de France d’avoir, à cause de son alliance avec les Turcs, plongé dans le cœur de la chrétienté le couteau ottoman. Fléau des Princes, il les flagelle par droit divin. L’opinion publique lui était, après tout, très favorable, et les prédicateurs ne se gênaient pas pour déclarer que, poursuivant le dessein de réformer la nation humaine, la nature et Dieu ne pourraient pas trouver de meilleur moyen que de produire beaucoup de Pierre Arétin.

Le Divin ayant quitté les cours en a maintenant une dans