il avait soin de choisir les bons morceaux et d’accaparer le pain. Michel s’étonnait de cette conduite ; Jeannot en fut si triste qu’il oublia de manger.
Au bout de peu de temps, le père tomba malade : il fit venir ses fils pour leur dire adieu. Il recommanda à Martin de ne jamais abandonner la chaumière. — Jeannot, dit-il au troisième, tu es un peu simple ; mais ce que le ciel a ôté à ton esprit, il l’a donné à ton cœur. Sois toujours bon, et écoute tes frères. Là-dessus il mourut. Martin et Michel éclatèrent en lamentations épouvantables ; mais Jeannot resta auprès du lit mortuaire muet, immobile, comme s’il avait perdu la raison. Au bout de quelque temps il sortit, s’assit dans le jardin et pleura comme un enfant. Après l’enterrement, Martin et Michel décidèrent qu’ils iraient courir le monde et chercher fortune. Jeannot devait rester à la maison auprès de leur mère.
— Le monde est grand, pensaient-ils : à force de le parcourir, nous pourrons rencontrer la fortune. En restant ici, nous ne deviendrons rien du tout.
Jeannot ne demandait pas mieux que de rester ; mais leur mère, qui était encore très vail-