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LA FILLE DU DOGE

était borgne. Il avait le nez recourbé comme un quartier de lune, la barbe pointue comme une pioche ; il bégayait, entendait mal et agitait sans cesse ses bras comme un moulin.

Il commença un beau discours, mais Zora l’interrompit aux premiers mots.

— Misérable, lui dit-elle, ôte-toi de mes yeux.

Elle serrait les poings, ses dents claquaient de rage.

— C’est bon, c’est bon, répliqua tranquillement le Cosaque ; croyez-vous qu’on tienne tant à vous, la belle ? J’ai les cheveux noirs, vous la tête grise. Vous ne voulez pas être ma femme ? On saura se passer de vous.

Zora n’en voulut pas plus entendre et le fit mettre à la porte par ses laquais.

En sortant, le Cosaque passa près du four à chaux et vit les valets qui s’apprêtaient à y jeter la servante.

— Non pas, non pas, s’écria-t-il. Attendez un instant. Ce serait vraiment dommage de brûler cette jeune personne.

Et s’adressant à la servante :

— Dis-moi, la fille, qui vaut mieux : brûler dans un four, ou devenir ma femme ?

La servante l’accepta aussitôt pour mari ;