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Page:Lénine - La Révolution bolcheviste.djvu/13

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veulent parler tout haut de la retraite. Puis c’est un aveu presque panique :

La machine vous glisse sous la main, on dirait qu’un autre homme la dirige, la machine court dans une autre direction que celle qu’on lui a fixée. Elle va où la conduit quelqu’un et quelque chose d’illégal, de clandestin, venu Dieu sait d’où ; des profiteurs ou des capitalistes, ou les uns et les autres ensemble (Discours du 27 mars 1922).

Lénine se pose la question sans y répondre : peut-être est-ce vrai que nous rétrogradons vers l’Etat bourgeois ?

L’histoire connaît toute sorte de métamorphoses. Se fier aux convictions, au dévouement, aux plus belles qualités de l’âme, en politique, ce ne serait pas sérieux. Les belles qualités de l’âme sont le patrimoine d’une poignée d’hommes, et ce sont les masses gigantesques qui décident des issues historiques ; elles traitent parfois ces poignées d’hommes d’une manière peu polie si ces poignées d’hommes ne leur conviennent point.

Puis de nouveau il se redresse. Il crie : « ce qui est conquis par la révolution russe est inexpugnable ».

Peut-être que notre appareil est mauvais, mais on dit que la première machine à vapeur qui fut inventée était mauvaise aussi, oh ne sait même pas si elle a pu accomplir quelque travail utile. Ce n’est pas cela qui importait. L’invention était acquise… Notre machine d’Etat peut être exécrable, mais elle existe. La plus grande invention historique est faite, l’état prolétarien est créé.

Mais il dit à la fin : « il faut comprendre et ne pas avoir peur de comprendre, que 99 communistes entre 100 s’occupent de ce qu’ils ne savent pas faire, qu’ils font mal leurs affaires, et qu’ils doivent tout apprendre encore ».

Ce discours effraya le parti ; et fit sensation. Un mois plus tard, l’esprit de Lénine sombrait dans la maladie. Des socialistes (non bolchévistes) qui ont vu le dictateur rouge entre ce discours et la crise physique, racontent que Lénine, de plus en plus déprimé, se laissait aller à dire qu’il avait ruiné l’idée socialiste, que tout était perdu ; ils racontaient qu’on tenait Lénine au Kremlin sous une observation vigilante, redoutant apparemment qu’il ne portât la main