Page:Lénine - La Révolution bolcheviste.djvu/15

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sif en Lénine pour ceux qui partageaient ses idées générales, ce fut ce mélange atroce. Plekhanov, Vera Zassoulitch, M. Tougane-Baranovski et l’auteur de ces lignes éprouvaient la même répulsion organique profonde devant la personnalité de Lénine, devant sa cruauté de bourreau et son indifférence complète quant aux moyens de la lutte.

L’écrivain russe M. Aldanov, qui a publié en 1919 un livre français sur Lénine, le caractérise de la manière suivante :

Au point de vue moral et intellectuel, cet homme tient de Savonarole et de Tartuffe. C’est une nature complexe et pauvre en même temps : complexité ne veut pas dire richesse. Un fou rusé comme tous les fous, un petit savant doublé d’un petit visionnaire, un connaisseur de masses qui ignore tout de l’homme, c’est un primitif compliqué, une combinaison des traits simplistes : fanatisme élémentaire, ruse élémentaire, intelligence élémentaire, folie élémentaire. Ceci fait peut-être sa force, car qu’y a-t-il de plus élémentaire que les demi-instruits, dont est composée la masse des ouvriers russes ? (M. Landau-Aidanov. Lénine, p. 70).

Dans une riposte spirituelle aux assertions de Churchill sur Lénine, l’homme d’Etat anglais lord Birkenhead (Times 26. II. 1929) proteste contre ce qu’il appelle « le mythe de Lénine ».

On cite quatre exemples démontrant la grandeur de Lénine : 1° Dès le début de la révolution il déclara « tout pouvoir aux Soviets » et les Soviets ont triomphé ; 2° Il fut à la tête du gouvernement bolchéviste qui put menacer la civilisation ; 3° Il retint Trotzki qui voulait briser avec l’Allemagne à Brest-Litovsk et préserva la Russie Soviétique de l’extinction ; 4° Il rejeta courageusement ses idées bolchévistes en 1921 et retourna au commerce privé.

L’historien pourtant va se rappeler certains faits : 1° Si Kerenski avait eu un gramme de savoir-faire politique et de courage, les Soviets n’auraient jamais conquis le pouvoir et Lénine n’aurait point vécu pour voir leur triomphe ; 2° L’existence prolongée du gouvernement bolchéviste n’est pas un acte d’état conscient ; le triomphe d’un vibrion du typhus dans le corps d’un enfant famélique ne prouve point la force de volonté et de prévision du vibrion… 3° Seulement quelques imbéciles hystériques ont pu croire que les bolchéviks pouvaient combattre l’Allemagne ; 4° L’économie bolchéviste ne fonctionnant plus, Lénine n’eut pas besoin de beaucoup de courage pour persuader ses collègues de faire un changement qui du reste échoua bientôt de même.