Page:Léo - Jean le sot.djvu/40

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et Jean, non sans peine, se hissa dessus ; car il n’y avait plus d’échelles assez longues, bien qu’on en eût lié plusieurs ensemble pour cette affaire. La lune était dans son plein, pure et superbe, et la moitié du village, rassemblée autour de l’échafaudage, riait à cœur joie d’une si bonne plaisanterie.

Quand le pauvre Jean, arrivé là-haut, leva la tête, il vit avec désespoir qu’il était encore bien loin de la voute bleue, où glissait la lune lentement, toute pâle, et le regardant, semblait-il, avec douceur, mais il n’en eut que plus de désir d’y atteindre, s’étant affollé de cette idée. Aussi, cria-t-il de tous ses poumons à ceux d’en bas :

— Encore ! encore ! il en faut quelques-unes de plus.

— Il n’y en a pas davantage, répondit-on.

— Cherchez, cherchez bien, cria-t-il encore. Nous avons tant fait, qu’il n’y faut pas renoncer.

— Il n’y en a plus répétèrent ceux d’en bas. Descends, Jean le Sot : ce n’est pas toi, va, qui prendras la lune avec les dents.

Il vit qu’on se moquait, et cria tout en colère :

— Non, je ne descendrai pas ! Tirez donc celles de dessous, qui ne servent à rien, et montez-les-moi.

Ce fut un fou-rire général dans l’assemblée, et, comme il y a des gens que le jeu rend fous, il se trouva de mauvais plaisants assez emportés pour se jeter sur la barrique de dessous et la tirer en tout sens. Ils en furent bien fâchés ensuite, et s’excusèrent en disant qu’ils avaient seulement voulu remuer un peu la pile ; mais elle croula, et le pauvre Jean se rom-