Page:Léo - Les Désirs de Marinette.djvu/29

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ça serait fini ; elle ne serait plus aussi occupée ; elle serait à lui comme auparavant.

Pauvre Joseph ! Ce fut bien pis quand Marie fut de l’Opéra. Il ne l’entrevit plus dès lors qu’au milieu d’un tourbillon où il ne pouvait la saisir.

Il avait laissé le rabot le lendemain de l’engagement qui garantissait à sa femme 20, 000 francs par an. Quelle fortune ! Il n’y pouvait croire ; mais ce qui l’étonna bien plus, c’est que, pour la première fois de leur vie, alors ils firent des dettes. Il avait fallu monter une maison pour laquelle tout fut neuf jusqu’aux armoires. Oui, Marinette fit vendre aux enchères, avec le mobilier de la rue Bleue, l’armoire de noyer verni, devenue trop vulgaire : son rêve de cinq ans !

Les débuts de la jeune femme avaient été éclatants. On parlait de toutes parts de sa voix incomparable, et, comme pour chacun de ses engouements, le public parisien se portait en foule tous les soirs au théâtre pour l’applaudir. Enivrée d’éloges, comblée de bouquets, Marinette vivait d’une vie enchantée, mais fébrile. Avait-elle bien le temps de s’occuper de Joseph ? Non ; elle avait assez à faire de disputer à ses courtisans le temps qu’elle devait donner à son art. Il y eut des jours où elle ne put même embrasser ses enfants. Heureusement, Joseph était là pour soigner et caresser les pauvres petits, et c’était bien heureux ; car la femme de chambre était si occupée de la toilette de madame, et la cuisinière de ses fourneaux, que ces deux jeunes