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UN DIVORCE

sa contenance, s’était appuyée contre un tonneau, et comme ensuite elle passa la main sur son visage, elle sortit de l’atelier plus barbouillée qu’on ne l’avait vue jamais.

Une quinzaine après environ, le soir, à Beausite, comme M.  et madame Desfayes allaient prendre congé de leurs parents, qui les reconduisaient, au clair de lune, dans l’avenue, madame Grandvaux, prenant le bras de Claire et l’attirant un peu à l’écart, lui dit à demi-voix :

— Ne trouves-tu pas que ton mari est tout triste depuis quelque temps ? Il est aussi très-bon pour toi et pour le petit, et cela devrait te toucher, ma fille. Je vois que tu l’évites toujours un peu et que vous n’êtes pas mieux ensemble. Tu as tort, Claire. Tu joues avec la paix de ton ménage, et tu pourrais, toute ta vie, te repentir de cela.

— J’ai bien remarqué, maman, qu’il était fort triste ; mais sais-je pourquoi ? Ah ! si je pouvais croire !… Mais non, ce n’est pas pour moi. Cela vient peut-être de ses affaires, ou peut-être même…

Elle poussa un grand soupir.

— Moi, je suis sûre que c’est à cause de toi. Je l’ai vu un moment qui te regardait, quand tu jouais avec le petit ; il a souri d’abord, et vraiment son regard était fort tendre. Puis tout à coup il a soupiré, a mis comme cela sa main sur ses yeux, et est redevenu tout sombre. Maintenant, ton devoir est de lui pardonner, ma fille, et tu serais coupable de ne pas le faire, ne serait-ce qu’à cause de ton petit Fernand !

Oh ! était-ce vraiment pour elle ? regrettait-il leurs chères amours ? Si son âme s’était adoucie enfin ? S’il avait compris qu’il ne pouvait être heureux qu’avec sa femme, son éternelle compagne, la mère de son enfant ! Le cœur