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UN DIVORCE

t’occupes de l’exécuter, c’est toi-même qui rendras l’oracle et qui seras le destin.

— Hélas ! reprit la pauvre Claire, qui ne se sentait guère tant de pouvoir, que peut-il y avoir à faire dans un malheur si profond ? Toi, Mathilde, que ferais-tu ?

Les yeux de la jeune personne brillèrent de résolution, et d’un ton implacable :

— Ceci est le domicile conjugal ; je le quitterais à l’instant même.

— Un divorce ! dit Claire en pâlissant.

— N’existe-t-il pas déjà entre vous ? Et que pourrais-tu gagner à poursuivre désormais une série de discussions et de scandales domestiques ?

— Ah ! s’il l’avait voulu, nous aurions été heureux ! Et c’est lui qui me dit que toute affection est finie ! Il ne m’aime plus ; pourquoi ? Moi qui ne cherchais autrefois qu’à lui plaire ! Je me fiais tant à lui ! Ah ! comme il m’a trompée ! Il n’est plus le même ! Non, il n’est plus le même que lorsqu’il m’aimait.

— Tout cela, dit Mathilde, ne sont que des récriminations où se complaisent ta faiblesse et ton impuissance, mais qui ne servent à rien ; car ce n’est pas en promenant ton imagination dans les sentiers du passé que tu pourras sortir de la difficulté présente.

Anna, qui était assise près de sa sœur, la prit dans ses bras :

— Laisse-la se reposer un peu, dit-elle à Mathilde. Vois, elle est épuisée.

— Se repose-t-on dans l’indécision ? N’est-ce pas, au contraire, le plus cruel des tourments ?

Depuis longtemps, caché derrière le fauteuil de sa mère, le petit Fernand regardait et écoutait sans qu’on