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UN DIVORCE

Mais il la saisit si rudement qu’il la fit tomber du lit par terre :

— Il me la faut ; dépêchez-vous ; prenez garde ! Qu’avez-vous fait de cette lettre ? Une lettre qui était à moi !

— Ferdinand… c’est à cause de votre maîtresse que vous maltraitez votre femme ainsi !…

— Vite ! vite ! Il y a du danger pour vous, je vous le dis !

D’une seule main il la releva et la mit sur ses pieds.

— Ah ! vous me bravez comme cela ! Vous touchez à mes choses ! Vous violez mes lettres ! Vous ne savez donc pas que je puis vous fouler aux pieds, là, tous les jours, vous écraser, sans que personne le sache ? Ah ! nous verrons ! Vite la lettre !

Elle se traîna jusqu’à la commode et la lui remit. En la voyant décachetée, il jeta sur sa femme un regard terrible.

— C’est bien ! Vous m’avez trahi, vous avez porté la main sur moi ! Vous avez manqué à vos devoirs envers moi, votre mari, votre maître, que vous devez respecter et à qui vous devez obéir ! Vous êtes capable de tout ! je commence à croire que vous avez un amant ; je vous hais, et vous tuerai quelque jour !

Il était colère, despote, elle le savait bien ; le dogme de l’autorité, qui, par une combinaison d’idées, étrange au premier coup d’œil, est l’âme du protestantisme, s’était infiltré dans toutes ses veines, et il avait reçu sa part de cet âpre orgueil que l’esprit de Calvin a déposé dans ses descendants ; mais jamais Claire n’avait deviné qu’il pût la regarder un jour avec tant de haine. C’était bien la mort de tout leur passé.

À partir de ce jour, ils cessèrent entièrement de se